-Maître vénéré, l’âme est malade. Comment la guérir ? -Vois les flots emporter toute chose…
Je ne savais pas qu’ici, en ce Temple, toutes ces âmes erraient, cher Maître, et j’entends la voix douce de votre appel. Elle fait l’effet du vent léger dans les roseaux, le bruissement apaisant sur les branches de l’arbre. Que se passe-t-il ? L’abandon me gagne.
Il pleut dans une contrée désertique et voici que depuis les grains de sable, au milieu des roches, pousse une végétation insoupçonnée. Qui des fleurs exquises, qui des herbes ondoyantes, qui de miroitants lacs, qui des ruisseaux épanchés et mélodieux et même des arbres s’élançant vers le ciel, majestueux. Voici que des oiseaux renaissent aux branches de chacun d’eux. Te souviens-tu de ce nid défait dans lequel un oiseau t’apprit à déguster un suc inconnu à la couleur blanche ? Te souviens-tu de ces créatures fabuleuses dont on ne connaît plus les noms ?
Au commencement, l’évidence qui s’offre sans résistance, sans nom, sans mesure, naturelle, épanouie, enchanteresse, puissante et englobante. Le cœur est étendu, dilaté, englobant, parlant sans mots, se taisant dans le parfait harmonique du Silence, ce Son immutable, lumineux, n’appartenant à personne, s’offrant à tous. Au commencement, les yeux sont ceux du cœur, un lac insondable et inépuisable. Au commencement, l’eau scintille, l’âme fusionne et danse. Les gestes du quotidien s’efface et il n’est que cet instant, lors que s’ouvrent l’univers, les étoiles, la nuit de notre âme, et où quelque chose attrape votre cœur. Je ne dirai pas qu’il s’agit de l’enfant, mais du Soi qui chante. Il est au centre. Je le reconnais et nous nous regardons longtemps, émerveillés de nous retrouver. Je cours vers la colline, j’entends frémir le vent, s’engouffrer par toutes les cellules de mon corps et je tends les mains, et Il se met à rire, à rire, à rire et mon être résonne tout entier de Sa Joie.
Comme est saisissante la complexité de l’être : vous êtes-vous jamais demandés comment vous pouviez voir vos rêves alors que vos yeux étaient fermés et que vous dormiez ? Comment pouvez-vous expliquer que des gens aveugles puissent voir les couleurs, les formes quand ils rêvent, alors qu’ils ne les ont jamais vues éveillés ?