Rapt

Quand le cœur aime,
Qu’il cesse de se disperser,
Et devient fou de l’Amour ?

Je me demandais comment avais-tu bien fait prisonnier ce cœur, et comment depuis cette prison, tu le libéras ? J’entends ta réponse qui ne cesse de me surprendre et faire écho en moi. L’instant n’est qu’un instant, et la vie n’est que l’instant de vie. Depuis le rapt d’Amour, tu vins heurter et heurter l’instant, jusqu’à en faire une éclosion et je respire sans respirer et je reçois sans discontinuité et « je » devient le seuil de tout voyage et les étoiles deviennent la laitance des embryons de vie.

Tourterelle

Au creux de midi,
Sur les toits rouges,
Où es-tu tourterelle ?

Accord

Deux corps, deux âmes, la puissance de l’accord. Deux êtres en silence qui retrouvent le son unitif de la rencontre. Deux instruments et l’appel du respect au toucher ! Oh ! Ici, entre les mouvements de chacun, l’apnée de l’ici-l’au-delà.

Merci

Par humilité

Dialogue

-Maître, que reste-t-il après la mort ?

-Qu’en est-il de la vie, fils ?

-Maître, la mort est-elle absence de vie ?

– Qu’est-ce donc que la vie, fils ?

Il pleut dans une contrée désertique et voici que depuis les grains de sable, au milieu des roches, pousse une végétation insoupçonnée. Qui des fleurs exquises, qui des herbes ondoyantes, qui de miroitants lacs, qui des ruisseaux épanchés et mélodieux et même des arbres s’élançant vers le ciel, majestueux. Voici que des oiseaux renaissent aux branches de chacun d’eux. Te souviens-tu de ce nid défait dans lequel un oiseau t’apprit à déguster un suc inconnu à la couleur blanche ? Te souviens-tu de ces créatures fabuleuses dont on ne connaît plus les noms ?

La petite fille

Parfois, nous ne sommes plus que des yeux, ou plutôt un cœur lié au regard. Mais de quel regard s’agit-il vraiment ? Ne suffisait-il pas de laisser notre cœur guider nos pas intérieurs ? Bien sûr, je ne suis pas sûre d’être comprise. J’avoue que cela me semble, hélas, la plus grande des probabilités. Mais, il n’est nullement question, ici, de fatalisme.

J’étais heureuse d’être seule. J’étais horrifiée de voir tant de gens inertes. J’étais fascinée par l’autre.

Je connaissais une petite fille qui ne jouait jamais à la poupée. Ces drôles de choses lui semblaient sordides. Quand elle voyait que ses camarades poussaient presque caricaturalement les landaus et poussettes, se prenant déjà pour une maman, la petite fille se mettait à courir pour échapper à l’atmosphère ensommeillée de ces enfants. Elle grimpait aux arbres et y restait durant de longs moments. D’où venait-elle ? Parfois, elle se le demandait. Elle se sentait bien partout. Il lui suffisait d’ouvrir grand le cœur et de respirer. Elle pouvait voguer jusqu’aux montagnes de l’Himalaya.

Force vive

Il nous arriva de traverser les flots, durant des tempêtes spectaculaires. Je montais sur le pont, goutant aux gouttes salées qui picotaient sauvagement mon visage. La force des vagues, leur éloquente violence imperturbable, nous donnaient à une force intérieure, rieuse et même exultante. Bien sûr que la mer faisait peur et se retrouver dans la vastité de la nuit noire et insondable était inquiétant. Tous les pires scénarios se profilaient. Pourtant, par delà la crainte, la puissance de la nature indomptable de l’eau me renvoyait à une absoluité glorieuse et saisissante. Je ne l’affrontais pas. Je ne me rebellais pas. Je la laissais me transmettre sa réalité, sa sagesse, sa nature. Je devenais une avec elle.

Lui

Laisse-moi parler de Lui !
Vois-tu comme je danse et je ris ?
Laisse-moi donc !

Nous ne nous lassons jamais de nous retrouver et l’instant, c’est Lui. Quand il vient visiter le cœur, le cœur Le reconnaît.

Regard

Si je ne suis pas le vent,
Tandis que si je ne suis pas la feuille,
Et si je ne suis pas Son regard ?

Tiens ! je te remercie Ô Vent, Feng ! Je te remercie libellule, et feuilles odorantes, et petits cailloux et crinière de cheval, et ciel qui descend et petites choses que l’on nommes et celles que l’on ne nommes pas et puis, les chansons éphémères et la vacuité, et toi, Amitié, puis toi, Anachorète, et toi fou qui déambules et toi qui lèves le doigt vers la lune et le rire de la chouette, et la porte qui grince si mystérieuse. Je te remercie, Ô toi, petite eau qui clapote, petite lumière ondoyante, petit papillon des bois, lucioles des nuits d’été, herbes caressantes, libres de me raconter vos secrets. J’aimerais vous remercier en vous énumérant, tous, un à un et rire … Ne vous figez point ! Jamais !

Illusion

Il n’est aucune illusion,
Lors que les yeux s’éveillent,
Au souffle de l’eau.

Faut-il aller loin pour revenir ? Dis-moi ?