
Peinture (détail) de CHIE YOSHII
Nous ne sommes pas dupes, nous ne l’avons que très peu été.
Nous n’avons pas vécu grisée par la duperie, mais nous avons tout de même été dupe de nous-mêmes. Cette seule faille nous a valu de retenir les temps de nos deux mains, peut-être aussi de nos deux mâchoires ; cette faille a eu pour effet de retenir les temps, puis le temps d’un monde qui n’a jamais eu véritablement d’impact sur nous, car nous étions libre, libre jusqu’à la moelle, libre jusqu’à ce qu’un immense éclat de rire nous ceint de ses deux bras et nous montre combien nous tenions le bon fil. L’homme n’aime pas entendre la vérité, oui, c’est vrai. Par conséquent, comment expliquer que nous avons eu l’audace de nous tenir face à elle, et même de plonger dans son flot vagabond ? Nous avons couru, comme tout le monde, oui, nous nous sommes prise au sérieux, comme tout le monde, puis, quelqu’un a tiré, derrière notre dos, cette chemise, la chemise de nos prétentions, manquant même de nous étrangler. Il nous a retenu d’une poigne ferme et nous a demandé : où vas-tu ? Quelle sorte d’extravagance nous a prise ? Quand le temps s’arrête, nous entrons nu dans la vallée. La vallée est d’abord la vallée de la peur, incisive, oui sans conteste ; elle est assurément le rendez-vous avec la vérité et la vérité est extraordinaire. Peut-être vous en confierai-je quelques secrets ?