公案, gōng’àn

Absurdité

荒謬扼殺了一切的價值

Il n’est aucune absurdité. Mais l’absurde conquiert son propre espace. Ne cherche pas l’absurde ailleurs qu’en toi. L’absurdité est réverbératoire d’une phénoménale incohérence.

一隻鳥穿過你的雲

風攪動樹葉

Le rêve agite ses propres feuilles et nous interpelle.

Le vent avait soufflé très fort parce qu’il souhaitait provoquer l’immobilité de l’arbre ; il apprit beaucoup en remarquant son inflexibilité. Toute irréductibilité fait surgir l’impatience de celui qui la méconnaît. La sagesse est profuse, le verbe nous instruit, le livre tourne lentement ses pages. Le rêve devient réalité. Il est comme celui qui marche, attrape les nuages et les noie dans l’infinité.

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Voyage IV

Avec le chaleureux assentiment de Laurence Délis, Voyage Restropective I et Voyage Restropective II, Je vous propose de continuer ensemble cette invitation au Voyage, inspirée de ses fabuleuses œuvres. Merci à Laurence pour ces belles représentations.

L’ébullition de tel ou tel propos, les distanciations de telle ou telle démarche, peu importe. Nous continuâmes de nous retrouver à l’extrême limite, frontière invisible qui nous parlait d’un autre monde. Nous avions comme suspendu littéralement les questionnements et immobiles, tous deux, nous regardions à ne plus jamais nous extraire du regard, car, en lui, voguaient nos réponses et nous étions serrés l’un tout contre l’autre, dans le froid hivernal. Ce qui était étrange, c’est que nos yeux devançaient tous les défis, et toute chose, et tout ce qui était connu, se défaisaient dans les ourlets du temps et de l’espace. Quand nos mains se retrouvaient, nous approuvions par elles nos liens immutables. Les vagues semblaient se pousser, chevaucher le temps et gagner l’au-delà. Je surprenais ton âme effervescente, celle jaillissante de mille feux. Sont-ce des prémices, me demandais-tu ? Je me contentais de faire une pression sur ta main. Nous assistions ensemble à l’éclosion de nos cœurs. Nous apprenions un nouveau langage. Nous n’avions pas peur.

Petit corps

La détresse,
Semblable élan,
Comme un rayon,
Flotte fragile

Petit corps,
L’homme rêve,
Aux femmes seules,
Les hautes mers,

Puis, l’écume invisible,
Par le rêve défait,
L’aube d’une vie,
S’est-il donc affranchi ?

Voyage II

Avec le chaleureux assentiment de Laurence Délis, Voyage Restropective I et Voyage Restropective II, Je vous propose cette continuité, serties de ses fabuleuses oeuvres. Merci à Laurence pour son partage.

Voyage séquentiel et partout comme un abîme de rêve, élaboration infinie de souffles, drapée de petits galets, bleutés car, de certaines azurées, tout est perlé de légèreté. Te souviens-tu des nuits qui furent nos contemplatives joies ? Nous étions deux sur le rivage et nous dansions sans perdre un seul instant la vivace présence. J’y ai inscrit une multitude de phrasées afin que d’autres songent aux dentelures de voiles soupirés, l’extrême de notre amour. As-tu suspendu le pinceau de tes pensées et incrusté nos semences comme formant une île dans laquelle nous nous sommes réfugiés ? Ici commence notre périple, itinérance soluble dans les aspérités d’un monde où tout est résorbé.

Rêve

J’ai aimé le rêve que tu traçais sur les sillons d’une vie durant. J’ai aimé le rêve, l’attrapant aux filets de tes douceurs, pesant chacun de tes mots, sur les feuillages épars de tes pas. Je m’étais mise sur le côté et regardais comme une personne qui découvrait un autre monde. A la dérobée, je longeais tes mots qui parlaient de moi. Ton bras sous le mien, le regard égaré, ton parfum des sous-bois et nous traversions un pont. Je suis entrée dans ton monde, comme on vole un instant, et je me suis cachée dans les allées du temps, en attendant. Si j’avais vécu, c’est ainsi que j’aurais aimé te trouver. Si je n’avais pas été si loin, je t’aurais rencontré et tu aurais lu ces quelques mots. J’ai longtemps façonné l’ivresse de mes mains qui pétrissaient la pâte. Je souriais en dessinant ton visage, m’efforçant de le tirer des brumes. Si j’avais vécu, je me serais assise sur ce banc et t’aurai regardé en silence. Si j’avais existé, je t’aurai donné rendez-vous en notre jardin et nous aurions ainsi parlé avec les yeux. Je t’aurais dit : Ne parle pas encore. Laisse-moi goûter l’instant de notre présence. Laisse-moi retenir ce moment à tout jamais !

La femme du jardin

Il me parut naturel de lui répondre, comme entraîné malgré moi dans cette familiarité spontanée. Et je lui demandai à brûle-pourpoint : Pourquoi ici ?

– Comment cela ? s’exclama-t-elle. Mais pour admirer les poissons rouges. Aimez-vous les poissons rouges, monsieur ? s’enquit-elle abruptement.

– Oui. C’est très joli, balbutiai-je un peu sottement, j’en conviens.

– En êtes-vous sûr ? insista-t-elle.

– Oui.

– Ah bon ! fit-elle, déçue.

Je la regardais. Elle était décoiffée, comme si elle avait couru dans la campagne. Pourtant, ses vêtements révélaient une élégance peu commune. Tout en elle respirait l’étrangeté, le mystère. Je ne parvenais pas à analyser sobrement la situation. J’étais saisi par le charme de ses gestes, de sa voix, de son regard évanescent. Confusément, je comprenais que cette rencontre allait bouleverser ma vie. C’est alors qu’elle s’était franchement tournée vers moi.

– Je suis Thaïs. C’est ma tante Esther qui m’a fait don de ce prénom. Elle a voyagé partout. Oui, vraiment partout. Une femme assez surprenante. C’est elle qui convainquit notre mère de m’appeler ainsi. Un nom illustre, d’après elle. Je ne suis pas certaine que ce prénom me plaise. Mais personne n’ose rien refuser à tante Esther.

– C’est un nom peu commun et je le trouve ravissant, déclarai-je prudemment.

– Pour ma part, je le trouve plutôt encombrant. Je suis définitivement liée à celle qui le portait à l’origine : une princesse égyptienne, au passé obscur et qui se convertit au christianisme plus tard, après avoir été recluse. Rien de bien réjouissant. Une fin tragique ! s’exclama-t-elle.

J’avais remarqué qu’elle ne s’était pas présentée comme on le fait habituellement et cela m’avait frappé. Au lieu de me dire, je m’appelle Thaïs, elle avait dit : je suis Thaïs. Comme je la regardais, elle se leva avec toute la grâce que l’on eût pu imaginer et se tint face à moi.

– Vous ne vous êtes pas présenté. Comment vous appelez-vous, monsieur ?

– Mon nom est Marcus Villié.

– Ce qui compte, c’est ce que nous sommes, déclara-t-elle, comme pour excuser mon nom si commun. Pensez-vous que ce soit le nom qui nous fait, ou au contraire, nous qui fassions le nom ? me demanda-t-elle en levant la tête, tout en ne manquant pas de suivre du regard, avec un intérêt non dissimulé, l’écureuil peu farouche, qui s’était aventuré au-delà de son arbre.

– Sans doute un peu des deux, répondis-je.

– Venez quand vous le désirez, Marcus Villié ! lança-t-elle tout en riant. Ici, vous serez toujours le bienvenu, ajouta-t-elle avec emphase.

Elle me regardait à la dérobée, et ses yeux, soudain plein de malice, pétillaient. La petite fille en elle apparut et cela me déconcerta. Elle était totalement imprévisible. Je finis par lui expliquer platement la raison de ma présence dans ce jardin afin, sans doute, de me donner une contenance.

– A la vérité, je pensais que cette propriété était inhabitée et même en ruine. Or, je vois qu’il n’en est rien.

– Puisque je vous dis que vous pouvez venir quand il vous plait. Ce jardin est à vous. Il ne vient jamais personne par ici et votre présence est plutôt une source de joie pour moi. La prochaine fois, je vous ferai goûter de mon miel. Nous avons placé, ici et là, quelques ruches avec ma mère. Je vis seule ici, depuis… Mais la jeune femme s’interrompit et ses yeux basculèrent dans ce qui me sembla être un gouffre sans fond, un vide abyssal et je frissonnai. Puis, elle se tourna lentement vers la vieille bâtisse et devint rêveuse. Sans crier gare, sans même me dire au-revoir, elle se mit à courir, comme se souvenant de quelque chose d’important et je restai là, hébété, ne sachant plus que faire. Je ne la vis plus. Avait-elle disparu dans les buissons comme par magie ? Il n’y avait plus personne et j’eus beau faire le tour de la propriété, je dus me rendre à l’évidence : il n’y avait ici nulle âme qui vive. M’étais-je alors assoupi un court moment, et la vision, ainsi que ma conversation avec Thaïs, n’avaient donc été que le fruit de mon imagination ?

***

*La peinture est de Carl Spitzweg

Le rêve

Si je n’avais laissé le rêve m’envahir, totalement m’investir,
La vie n’aurait jamais eu la saveur du rêve, ni même son odeur.
Si je n’avais pas laissé le rêve m’enlacer, m’épuiser de sa ténacité,
Si je n’avais pas laissé le rêve s’incarner dans la chair de mon cœur,
Si je n’avais pas rêvé de la vie puissamment, je n’aurais rien goûté,
Mais le rêve m’a rattrapée comme ne me laissant aucune trêve,
Dans sa force et sa folie, j’ai entendu quelqu’un me parler,
Puis, il est venu jusque dans mon silence m’émerveiller,
Le rêve si ardemment désiré, quand de mes soupirs s’est emparé,
Puis il m’a jeté au pied de la falaise et a ri de mon impiété.
Il a chevauché mes transes, mes itinérances au parfum de lui,
Puis m’a ramenée jusque dans les vagues de ma crucialité,
J’ai vu à ce moment le rêve devenir réalité et m’en suis étonnée.
Maintenant, je sais que le rêve est plus fort qu’une quelconque crudité.
En lui, sans faillir, me suis totalement abandonnée.
Je lui ai enfin parlé, l’ai placé au creux de mes rêves,
Du songe à la vérité, ne me suis guère éloignée,
Lui ai confié tous mes rêves et lui de me conquérir,
Sans que je ne sache plus si du rêve je désire me réveiller,
Puisque s’est estompé le monde et que je n’ai plus rien à offrir,
Dans les bras du rêve, j’ai vécu les moments inachevés de notre éternité.

Semblable rêve 相似的夢想*

Vient-on semblable
Vient-on, semblable rêve
Mais qui donc nous défroisse,
Du rêve abîmé,
Et qui donc nous y soumet ?
Qui donc dont la main à peine,
Me donne à son toucher,
Et qui donc fait souffler les arbres,
Et qui emplit mes poumons ?
Qui donc fait voyager les nuages
Et qui fait que les mots se soient envolés ?
Vient-on semblable,
Quand le ciel danse,
Quand le chant est vent primesautier ?
Vient-on semblable, Ô mon doux tourment
Vient-on plié par ce déchaînement ?
Et quand je pense quand je pense,
Je vole je vole vers l’amant
Et quand je pense et quand je pense
Je ris puisque rien ne m’a arrêtée.
Vient-on semblable,
Oh ! vient-on semblable,
Dans les rosées aux herbes folles,
Que je n’ai jamais quittées,
Que je n’ai jamais quittées,
Que je n’ai jamais quittées

*Prononciation : Xiāngsì de mèngxiǎng