
Ecrire au son de la voix, la fragilité d’un instant de présence, aux cimes d’un timbre inconnu, et se laisser suspendre par le resserrement soudain d’une main ; puis se laisser étreindre par la légèreté d’un matin, car cette perception a reconnu la douce brise de la trame, lors que ce frémissement nous immobilise et qu’il retient de sa force extrême, notre cœur encore ébaubi. Il était, en un temps, quelque peu reculé, une jeune fille qui marchait au sein de la plus grande solitude, écorchée à vif par les murs implacables de l’inertie. Elle traçait sur les voiles du ciel, une ou deux phrases. Tout le monde ne peut être ainsi submergé par l’élan vital, et elle le savait. Cela semblait presque cruel. Cela était une déclaration de guerre, mais aussi un affranchissement après de longues batailles. S’extraire des nues de l’inertie : telle était son aspiration. On lui donnait, parfois, une hache, un lasso, un burin. Mais elle se contentait de les laisser tomber sur un sol semé d’herbes folles. Elle parcourait les champs de blé avec, souvent, un livre à la main. Était-ce l’ardent désir du bâton intime, celui qui n’existe que dans notre âme ? L’on était à se cogner partout. Pourtant, il devait bien exister une béance, une sorte de folie qui émerge depuis les entrailles de notre vie ? La brèche était palpable. Elle y mettait un doigt, tout comme Saint Thomas le fit sur la plaie de Jésus. Il avait touché et vu la réalité. L’on devenait, alors cette brèche et l’on s’y engouffrait sans remords. Traversant l’inévitable brisure, les ténèbres de la nuit, l’on se retrouve à l’autre bout. Il ne suffisait pas d’en parler, et les beaux parleurs, hélas, couraient le monde. Il fallait entrer dans la blessure. Mais, l’on n’y entre pas vraiment. Un jour, la blessure s’ouvre et l’on reste pantois devant cette immersion. Et lors que l’on en revient, l’on ne revient jamais comme avant. Je sais dit-elle au vent, au soleil, aux oiseaux, aux arbres, je le sais parfaitement que tout le monde n’entre pas dans ce monde-là. Il coûte bien trop cher. Il est le fond dans la forme. Il est le sacrifice inévitable de tout ce qui appartient à l’égo. Voici Totem et voici Tabou. Voici mon sang et voici ma chair. Voici la résurrection des quatre oiseaux d’Abraham de notre écartèlement.