Soleil et Lune

La sagesse consiste à prendre le temps de peser toutes choses et de se laisser irriguer des réalités de la vie profonde. Vivre au rythme du pouls terrestre, regarder les nuages, les fleurs, tout cela ne peut être une anecdote en passant. Quand je le vis, je me lançais à corps perdu, à corps abandonné dans les bras de son étonnante magnanimité, dans les confins de sa préciosité. Cela peut sembler aussi fin qu’un cheveu, cela peut ressembler à un proton, l’effet d’une touche précise et délicate. Cela peut aussi ressembler à des milliers d’années-lumières, à une myriade de constellations, aux vents les plus improbables de millions d’étoiles. Tant que le soleil suit sa lune, que voulez-vous qu’il advienne ? Tant que la lune suit son soleil, que voulez-vous qu’il advienne ? Tant que l’Amour est la plus puissante des lumières, et qu’un orbite se met à poursuivre ce qui le poursuit, vous ne craignez rien et vous êtes forts de cette Joie incommensurable qui vous saisit perpétuellement. Celle-ci est le plus grand de tous les boucliers. Voyez comme la lune rit aux éclats, et comme le soleil est fidèle à son amante !

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L’année du corps

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Quand il vint à passer, ce souffle insonore, et que l’étanchéité des bruits fut résolue dans la simplicité des moments qui requièrent beaucoup de temps et beaucoup d’espaces en l’alternance équitable des lieux et des temps, quand le nomade installe son bivouac, et que le citadin offre son grain, l’on voit que quelques semences dans le jardin éclosent. Sont-ce les parfums d’une juste mesure ? Quand les saisons nous parlent, nous comprenons la nécessité d’être de la nature en sa parfaite régularité et son successif équilibre. Alors, l’homme gravite sans effort par-delà les opacités, et brise en lui-même la dureté d’une roche, soulève le manteau du sacrifice et accueille les profondeurs de ses possibilités. Il ne s’arrête en aucune cité, ni n’élude le nomadisme. Il va sur la route et scrute l’étoile. Tel est le corps qui parle.

Béatrice, le 06 janvier 2020

Correspondances IV

Cher,

Le toucher de grâce est sensible tel le souffle dans un branchage. Vos pas étaient mesurés, tandis que je me tenais droite en cette expérience de vie qui m’avait donné, non pas à la méfiance frileuse, mais plutôt à la plénitude de l’être. Plus tard, c’est vous même qui me parlâtes de vigilance. Si une profonde sympathie est de suite notre ressenti, nous avons tous deux posé parcimonieusement les pierres de l’édifice de notre relation, nous les avons posées doucement, au fil des moments, moments qui du reste se décuplaient malgré nous en l’infini. Nous ne respirions que lentement. Vos mots me touchaient. Vos réponses courtoises et vos silences tempérés me mettaient en cette vibration que j’aime et que je sais reconnaître. Notre corps vibratoire ne ment jamais. D’ailleurs, il est sans doute ce qui nous échappe le plus, malgré nous. L’on peut être révérencieux, ou même fruste, cela ne change rien à notre nature intrinsèque. J’avais compris depuis quelques temps que notre nez possédait des facultés que l’on avait hélas réduites au simple odorat. Or, s’il est vrai que le nez est le révélateur sensible des odeurs distinctes, il existe certaines senteurs qui relèvent plus du cœur et c’est alors que notre nez devient le parfait instrument de mesure de la vibration des corps, de tous les corps, j’entends, sans distinction. Quand nous savons prendre le temps de respirer, et que nous nous y abandonnons, nous finissons par découvrir mille et une subtilités qui flottent en permanence comme autant de langage olfactif insoupçonné. Langage du corps dense et éthérique. C’est ainsi que le temps que l’on suspend, devient étrangement un espace. Cet espace lui-même devient le lieu de l’expérimentation multiple de toutes nos possibilités d’être-au-monde, car nous ne sommes plus dans les projections mentales. Nous arrivons vierges de toutes considérations et de toutes idéologies.

Bien à vous,

B.

L’encre au soleil

L’encre au soleil de tes années juvéniles clament encore, en ta maturité, l’enfance de ton cœur intouché par le malheur, et si sur le visage de ton âme, le corps trace des sentiers, c’est parce qu’un jour nous nous sommes rencontrés et c’est parce que toute la vie transpire et c’est en cette lueur que je t’écoute et m’assois auprès du regard de ton âme, celui qui fait frémir l’écorce du monde entier et je suis femme de t’avoir pleinement regardé, et quand tu vas, le sourire t’accompagne et le vent auréole le blé de tes cheveux éparpillés. L’amour a cette virilité dans le cœur de la femme, et l’amour est une intense atemporalité qui nous mène loin, tandis que l’esprit féconde les mondes nouveaux, les mondes qui sont aujourd’hui à se déployer. Ma plume trempe dans ton encrier.

Feuilles aurifères

S’il n’était ce simple pas, sur lequel mon corps entier repose, et s’il n’était la brise légère aux tréfonds de la terre, s’il n’était le boisement des feuilles aurifères, au murmure des senteurs ancestrales, aurais-je souri à l’étoile ?

Le corps

Les mots sont les parfums de l’âme. Le vent souffle et le corps parle. Parfois, s’y suspendent d’autres mots et ce sont des portes qui ne se ferment jamais. Pourquoi ? J’aperçois les lettres et je vois qu’elles sont une multitude d’étoiles. Une feuille qui s’envole et l’âme a chaviré. Le corps ne ment pas. Quelle est donc sa vérité ?

Mal entendant

J’ai balbutié et la voix est venue, entraînée et je n’ai pas pu ne pas l’entendre et je n’ai pas pu ne pas l’écouter. J’ai trébuché, mais le pas a retenu le souffle, laissé frémir la rencontre. Il est des ricochets que le corps apprend à connaître, comme un écho, car, de ne pas entendre, j’ai écouté. Le monde est une caresse. Je lui ai dit : entre !