Correspondances XII

Cher,

Je continue de vous écrire et de vous nourrir dans l’espace devenu inévitablement le lieu intemporel, le lieu existentiel de notre relation. Quand nous débutâmes cette correspondance, vous manifestâtes votre surprise. Sans doute ne pensiez-vous pas, qu’à l’image de mes écrits, j’étais celle-là même. Quand bien même nous nous déployons durant la vie qui nous est donnée, nous ne changeons pour ainsi dire jamais. Chaque fois qu’il m’advenait de passer d’une étape à une autre, je n’éprouvais fondamentalement aucune surprise, puisque je ne sentais pas que j’étais finalement devant l’inconnu. Bien au contraire. J’étais plutôt étonnée de voir combien nous étions fidèles à ce qui est en nous, malgré les complexités traversées. La constance se déploie et nous enseigne. Chaque abstraction s’extraie des émotions aliénantes. Plus il nous est donné d’observer, et plus cela est à se dire, sans posture, sans mensonge, sans tromperie. A quoi cela pourrait-il bien nous servir de nous maintenir dans l’illusion ? Aujourd’hui, vous savez, que très tôt l’écriture a été le plus grand outil d’ancrage et de réalisation durant notre petit passage visible sur terre. Les mots nous offrent le moment d’une incisive mesure, l’instrument qui nous apprend à être sans fioriture, le miroir, le reflet, et l’interprète. Les mots ne se sont pas servis de nous, mais nous ont servis, avec cette acuité régulière qui ne nous a pas échappé et j’ajouterai même qu’ils nous ont plutôt impitoyablement bousculée. Ils nous ont donné aussi à respirer les mots de tous, c’est-à-dire l’âme de tous. Les mots ne nous piègent pas. Ils ne sont pas dupes de nos usages. Le vrai mot est un mot qui nous pointe du doigt. Il ne nous lâche pas et nous cherche inévitablement, tout comme la vision du monde est le corps d’âme et d’esprit qui se révèlent. Vous l’avez justement compris. Vous même, ayant l’expérience réelle et révélatrice de votre écho-au-monde. Je vous remercie pour m’avoir permis de vous écrire, de vous rencontrer, de vous recevoir, de nous mettre en cette harmonie. Je continuerai, car tel est notre vœu mutuel.

Bien à vous,

B.

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